Réunir les conditions du plein Emploi en France
L'Odissée des présidentielles 2017
Revenu universel : tous responsables les uns des autres ?Le revenu universel relève d'un principe de solidarité universelle et inconditionnelle. D'aucuns estiment que son coût pose un problème de financement insoluble. Mais au-delà de l'aspect financier*, Il présente un enjeu d’efficacité, lequel recèle deux lourdes difficultés d'ordre sociologique qui concernent le système et les acteurs.
Compléter la solidarité : instaurer la responsabilité mutuelle
Attribuer un service continu gratuit et sans contrepartie revient à assister la personne sans lui demander de se prendre en charge d'aucune façon. Ceci revient à installer le bénéficiaire dans une situation de dépendance, à ne pas l’engager dans un parcours de développement personnel, à ne pas lui permettre d’acquérir son autonomie. En contradiction avec les principes de dignité et de fraternité, cela n’est pas acceptable, sauf à souhaiter le laisser dans une situation d'assisté et de dépendance durable.
De plus, comment une aide peut-elle avoir un impact pérenne si l'aidé ne s'en saisit pas ? Aide-toi, le ciel t'aidera : il faut avancer par soi-même pour déclencher des opportunités ; Mieux vaut apprendre à pêcher que de donner à manger : plutôt construire l'autonomie que faire la charité ; Un pour tous, tous pour un : chacun est responsable de tout le collectif, le collectif est solidaire de ceux qui sont en difficulté.
Tout pacte social durable repose donc sur deux dimensions qui s'alimentent l'une de l'autre : donner pour recevoir ; agir en responsabilité pour pérenniser la solidarité.
Don sans contre-don n'est que ruine collective
La responsabilité d'une personne en situation de dépendance peut prendre deux orientations : se détacher au plus vite de l'assistance dont elle bénéficie pour prendre son indépendance, ou s’assurer de la pérennité du mécanisme de soutien dont elle profite. S’il veut bénéficier d'une aide durable, il appartient au bénéficiaire de s'assurer du bon fonctionnement permanent du mécanisme d’aide. Sinon, sans sa vigilance, voire sa contribution au système, sa situation d’allocataire pourrait être précaire et serait alors un pari qui pourrait ne s'avérer gagnant que pour un temps seulement. L'aidé doit donc aider l'aidant à l’aider. Chacun devient alors responsable d’une relation solidaire, et solidaire d’acteurs responsables.
Mais il ne suffit pas que le système articule des formes de réciprocité indirecte : pour être durable, il est impératif de l’insérer dans le tissu sociétal. Imposer un dispositif ne peut suffire longtemps. Pour que les différents acteurs l’acceptent puis se l’approprient, il convient de s’assurer de la reconnaissance de la valeur des apports de chacun pour tous et surtout par tous, au premier rang desquels les aidants et les aidés. En conséquence, l'aidé se trouve dans l’obligation d’apporter une contribution réelle, visible, mais aussi perçue comme positive par l'aidant lui-même : celui-ci peut alors évaluer l’impact de ce qu’il apporte à autrui pour lui-même à long terme. Il s'agit là non pas d'opposer intérêts personnels et intérêt général, mais au contraire de les conjuguer : aider autrui revient à alors à s’aider soi-même. D’une façon ou d’une autre, la réciprocité indirecte doit donc inclure une dimension de retour sur investissement mesurable par chacun.
La conscience partagée par l'ensemble des parties prenantes d'un meilleur niveau de réussir ensemble s'avère donc une condition sine qua non du vivre ensemble durable. Sinon, si certains perçoivent que vivre ensemble revient à échouer ensemble, pourquoi voudraient-ils rester ensemble ? Et qui serait d'accord pour continuer à aider celui qui se trouve dans la peine alors même que l'aide apportée resterait sans effet durable…? Si ceux qui aident le plus le collectif sentent que leurs personnes ou leurs apports sont mal traités, le risque existe qu'il s'en détachent… et que les bénéficiaires de l'aide n'en puissent alors plus bénéficier à terme. Ainsi, si aucune contrepartie n'était demandée aux bénéficiaires d’une énorme aide comme le Revenu universel, le système s'avèrerait au mieux éphémère, au pire destructeur du corps social.
Valoriser l'engagement citoyen et organiser le débat public
Le revenu universel n’est donc envisageable que s’il est efficace dans la production d’un grand saut qualitatif vers plus d’autonomie des personnes, plus de cohésion sociale et plus de performance globale de toute la société. Il faudrait donc le conditionner au versement par les bénéficiaires d’un contre don porteur de cette transformation sociale et qui soit perçu comme équitable et productif par tous.
La piste consiste à demander à chacun de présenter son profil citoyen. Cette dimension identitaire nouvelle retracerait le parcours citoyen en deux dimensions : les engagements au service des autres, la participation à des débats publics. Ce Cv citoyen, à mi chemin entre la carte d’identité et le Cv professionnel, constituerait un document officiel.
Resterait alors à recenser les travaux d’intérêt général pour lesquels l’équation économique demeure impossible et pour lesquels il serait donc alors possible de demander aux bénéficiaires-citoyens d’y consacrer quelques heures à temps partiel. Les nombreuses idées, à commencer par celles du tissu associatif, devraient faire l’objet de dialogues ouverts à toutes les organisations publiques ou privées au sein de territoires de proximité.
Dans ces conditions, devenu inséparable d’une dynamique de débat public et de mobilisation du citoyen pour la cité, le revenu universel relève alors de la fondation d’une société nouvelle, dans laquelle chacun connait, consent et assume a priori son rôle nouveau dans un contrat social de solidarité et de responsabilité renouvelé.
La mécanique d’organisation du débat public de proximité et productrice de citoyenneté existe. Activer les racines de la performance durable passe par là. Si le débat sur le revenu universel pouvait en devenir le déclencheur à grande échelle…
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